Transhumanisme, la révolution en marche

Publié le 18/06/2018

Transhumanisme, la révolution en marche

Le philosophe Luc Ferry, auteur de « La Révolution transhumaniste », était l’un des invités d’honneur du rendez-vous « futuroscopique ». Sa conférence de clôture a soulevé plus d’une réflexion sur le devenir de l’Homme et de ses potentialités.

« C’est à bon droit que la philosophie est appelée science de la vérité », disait Aristote. Des siècles de réflexions métaphysiques ont abondé cette quête, jusqu’à plonger l’Humanité tout entière dans le bain de questionnements sans fin. 
Cette vérité-là, Luc Ferry ne prétend pas la détenir. Tout juste s’étonne-t-il que l’Europe au sens large, la France tout particulièrement, n’aient pas encore pris à bras-le-corps la nécessité d’anticiper l’avenir de l’être humain. Et de se pencher, philosophiquement et, plus encore, politiquement, sur la révolution qui se fait jour, celle ourdie par la pensée transhumaniste. « A travers le transhumanisme, explique-t-il, se dessine la certitude que le monde est en train de passer de l’ère de la médecine thérapeutique à celle du modèle augmentatif. Les progrès technologiques sont tels que dans dix, quinze ou vingt ans, l’homme aura accès à des outils qui bouleverseront sa condition, le rendront plus intelligent, plus fort et accroîtront sa longévité. Cette inéluctabilité, les Etats-Unis l’ont déjà appréhendée, pas le Vieux Continent. »

Une régulation concertée

Sera-ce le destin des générations futures que de vivre 150, 200 ou 300 ans ? Selon l’ancien ministre de l’Education, tout porte à le croire. « Sciences cognitives et intelligence artificielle, puces intégrées, séparation des gènes, bio-chirurgie… sont autant d’atouts mis progressivement au service de l’Humanité, pour l’aider à aller toujours plus loin dans sa connaissance et sa maîtrise d’elle-même. Le transhumanisme est, avec l’économie collaborative, l’une des deux retombées essentielles de la 3e révolution industrielle, celle du web et des NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et cognitivisme). Mais l’un et l’autre avancent à grands pas et échappent pour l’heure à toute régulation. C’est de la capacité de nos politiques à réguler, encadrer et harmoniser, non pas de manière sporadique, mais à l’échelle du monde, que dépendra leur influence sur le développement d’un Homme nouveau. »
 

« Augmenter la vie, c’est reculer la mort »

Cette recherche de régulation pose immanquablement la question des limites à ne pas franchir. L’homme ne doit jamais être utilisé comme un moyen, mais comme une fin, écrivait Kant. « Tout l’enjeu des prochaines décennies sera de faire la part des choses entre humanisation et déshumanisation, hommes et surhommes, explique Luc Ferry. La mort et la vieillesse sont très naturelles, mais lutter contre elles l’est tout autant. Augmenter la vie, c’est reculer la mort. C’est ce à quoi aspire le transhumanisme. Science-fiction, blague de potache ou réalité incontournable ? Quoi qu’on en pense, on est en plein dedans. » Comment passer, dès lors, à côté de cette réflexion planétaire qui s’impose ?